Berlin, une ville dans l'Histoire
1er - 5 avril 2019
Le but de ce séjour à Berlin était de faire découvrir aux élèves du lycée les divers aspects de la capitale allemande, qui reflète, par son architecture, de grands moment de l'Histoire : le IIème Reich (1871 - 1918) avec le Reichstag, aujourd'hui le Bundestag, la République de Weimar, le IIIème Reich (1933 - 1945) avec le Ministère de l'Air et le camp de concentration de Sachsenhausen, la Guerre Froide (1947 - 1991) avec le Mur, puis la Réunification du pays après 1990 avec les nouveaux monuments.
La Porte de Brandebourg. |
Nous verrons ce voyage dans l'ordre chronologique des visites.
1er avril 2019
Après une nuit de voyage et un bon petit déjeuner à l'arrivée, les élèves ont commencé à parcourir la ville avec la découverte de la Porte de Brandebourg, du Mémorial des Juifs Assassinés d'Europe, puis du Musée de l'Espionnage en descendant vers la Leipziger Platz.
Le Musée de l'Espionnage présente, de façon très ludique, une remarquable collection d'objets utilisés par les services secrets, de l'Est comme de l'Ouest, mais il retrace aussi l'histoire de l'espionnage depuis l'Antiquité. Voici une toute petite sélection d'objets.
La célèbre machine Enigma utilisée sous le IIIème Reich. |
La machine à coder soviétique Fialka M 125, utilisée des années 1950 aux années 1990. |
Un gant - pistolet utilisé par l'OSS. |
Une montre - appareil photo Steineck, de la RDA (1949 - 1951). |
Un micro bien caché ... |
Le célèbre étui à violon... |
Le "parapluie bulgare" utilisé par les services de l'Est pour empoisonner les dissidents. |
Une Trabant utilisée pour le repérage thermique. |
2 avril 2019
Le Mémorial des Juifs Assassinés d'Europe a été construit entre la Porte de Brandebourg et la Potsdamer Platz, dans un lieu symbolique qui était avant 1945 un vaste jardin qui bordait la Chancellerie du Reich et le bunker où Hitler se suicida le 30 avril 1945, ainsi que le Ministère des Affaires Etrangères, donc des centres du pouvoir nazi aujourd'hui disparus.
Ce mémorial, inauguré en 2005, se compose d'une vaste esplanade avec 2711 stèles grises, de tailles différentes, et posées sur un sol ondulé. Elles symbolisent la destruction : on peut y voir des tombes, des champs brûlés, des ruines ... S'y promener est très déconcertant, car on s'y perd véritablement !
Ensuite, il y a un centre de documentation souterrain qui retrace l'histoire de la Shoah avec de nombreux documents présentés sur des panneaux lumineux et les noms des juifs assassinés, avec leurs portraits, sont projetés sur un mur. C'est un moment très saisissant et empreint d'émotion.
La "Topographie de la Terreur" se situe à l'est du Mémorial. C'est un lieu particulièrement intéressant pour appréhender la notion de totalitarisme mais qui nécessite aussi beaucoup d'explications pour les élèves car sa compréhension n'est pas facile ...
Le lieu est composé de strates successives remontant au IIIème Reich et à l'époque de la RDA, donc aux totalitarismes nazi et communiste.
- Au premier plan, on voit le sous-sol de l'immeuble du RSHA (le Reichssicherheitshaumpamt), qui était le service de sécurité du Reich, composé de la Gestapo, de la Police Criminelle, et du SD (le service de renseignements de la SS) réunis depuis le 27 septembre 1939. Ces services, qui ont été les instruments de la terreur nazie en Allemagne et en Europe occupée, occupaient un immeuble, détruit en 1945, et dont il ne reste que des caves et des locaux techniques avec des murs en briques ou en tuiles émaillées.
- Au dessus du sol, il y a un large tronçon du Mur de Berlin (1961 - 1989), du moins, du mur extérieur (côté Berlin -Ouest) reconnaissable par des cylindres de ciment au sommet des plaques destinés à empêcher une prise facile aux fugitifs qui tenteraient de le franchir. Le second mur (côté Berlin -Est) n'est plus visible. Ces éléments du Mur de Berlin sont très dégradés, de nombreux touristes ayant voulu rapporter un souvenir de la ville ... Ils permettent néanmoins de visualiser cet élément qui coupait la ville en deux.
- Enfin, le dernier élément, qui domine l'arrière - plan avec ses formes massives, est l'ancien Ministère de l'Air du IIIème Reich, dernier monument intact de l'époque nazie à Berlin. Ayant échappé à la destruction en 1945, le bâtiment fut occupé par les Soviétiques qui y installèrent leur Q.G. Aujourd'hui, c'est le Ministère des Finances ... Devant l'entrée, au n° 97 de la Wilhelmstrasse, il y a des écrans numériques qui égrènent des mots dans toutes les langues ...
Le site de la "Topographie de la terreur" comprend aussi un centre de documentation, extrêmement riche, voire trop riche, qui présente de nombreux documents sur l'époque du nazisme. Si certains sont connus et présentés dans les manuels scolaires, d'autres méritent l'attention comme ces unes de Time Magazine qui montrent au public américain les crimes de masse commis par les nazis en Europe.
La couverture de Time Magazine , du 23 février 1942, présentant Heydrich, le n° 2 de la SS et ses crimes. |
La couverture de Time Magazine du 11 octobre 1943, sur Himmler et les crimes de masse commis en Europe. L'arrière-plan de l'image montre un empilement de cadavres. |
En remontant la Wilhelmstrasse, vers la Porte de Brandebourg, on peut encore voir de nombreuses traces de l'Histoire :
- Une vaste "fresque" de 1952, composée de carreaux de porcelaine venant de Meissen, en Saxe, qui glorifie le socialisme et la RDA. Quelle image voulait donner le SED qui dirigeait le pays ?
L'ouvrier (en bâtiment) est encouragé par le Parti, très bienveillant à l'égard du peuple. A l'arrière, on voit de nouvelles maisons, toutes identiques, qui sont en train d'être construites.
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Une paysannerie équipée de tracteurs, cherchant la productivité et unie à la classe ouvrière. |
Priorité à l'industrie lourde : sidérurgie avec hauts - fourneaux, construction mécanique, afin d'équiper le pays. |
L'ancien emblème de la RDA, avec les gerbes de blé (la paysannerie), le marteau (classe ouvrière) et le compas (travail intellectuel), faisait une synthèse de ces théories.
On croise aussi un panneau qui rappelle la Conférence de Berlin de 1884 - 1885, qui aboutit au partage de l'Afrique entre les puissances coloniales.
Enfin, c'est le retour à la Pariser Platz et à la Porte de Brandebourg. Les élèves ont découvert le quartier des ambassades et l'Hôtel Adlon, totalement reconstruits, et revu la Porte de Brandebourg entièrement restaurée.
Le blason de l'ambassade du Royaume - Uni. |
L'ambassade de France. |
L'ambassade des Etats - Unis. |
L'hôtel Adlon. |
La Porte de Brandebourg. |
Le quadrige de la Porte de Brandebourg. |
Ensuite, pour finir la journée, nous avons visité le Mémorial des Sintis et des Roms assassinés par les nazis, qui se trouve dans un jardin proche du Bundestag.
Autour du bassin rond, le sol est composé de stèles portant le nom d'un camp de concentration ou d'extermination et des murs translucides permettent aux visiteurs de suivre ce génocide.
3 avril 2019
Il y avait deux grandes visites prévues dans la journée. Le matin, le groupe est allé visiter le Mémorial du Mur de Berlin, situé le long de la Bernauer Strasse, qui, jusqu'en 1989, séparait le secteur français du secteur soviétique. Cet endroit reste tristement célèbre car le Mur, qui commença à s'élever le 13 août 1961, passait d'abord par les façades des immeubles, qui furent murés ce jour-là. En effet, l'accord de partage de la ville avait délimité les secteurs de sorte que les habitants étaient en secteur français en sortant de chez eux mais revenaient dans le secteur soviétique en passant la porte de l'immeuble ... La rue fut donc le théâtre de scènes terribles, des Berlinois sautant des étages pour tomber ensuite dans les bâches tenues par la police ou les pompiers de Berlin - Ouest ...
Le Mur fut ensuite renforcé avec la destruction des immeubles, remplacés par un second mur en ciment à partir de 1966. Le secteur prit donc l'aspect classique du Mur de Berlin : un mur double, avec un No Man's Land composé d'une barrière de barbelés électrifiés, de la route de surveillance avec ses lampadaires, et de miradors.
Une structure métallique permet de bien voir, depuis une plateforme, ce tronçon du Mur, le mieux conservé de Berlin.
Le tracé du Mur est symbolisé par une série de rails métalliques et par des plaques au sol: celles de forme ronde indique le lieu où furent abattus des Allemands qui tentaient de le franchir. De grands panneaux permettent le bien visualiser le secteur à l'époque de la Guerre Froide.
Enfin, la promenade a mené les élèves à la Chapelle de la Réconciliation, une construction circulaire élevée en 2000 à l'emplacement de l'ancienne église, dynamitée par les autorités est - allemandes, car elle gênait la vue des gardes ... Des blocs et sculptures venant de cette église sont disposés autour de la chapelle ainsi que la flèche du clocher.
La pause repas du midi s'est déroulée à Checkpoint Charlie, le célèbre passage entre le secteur américain et le secteur soviétique, reconstitué avec la guérite et les panneaux.
Le temps de l'après-midi a été consacré à la visite du camp de concentration de Sachsenhausen, situé à 30 km au nord de Berlin.
Un premier camp avait été ouvert dès 1933, dans une ancienne brasserie située à Orianenburg, et gardé par les SA. Fermé en 1935, ce camp fut remplacé par celui de Sachsenhausen, construit à partir de 1936 sous la direction de Theodor Eicke, commandant du camp de Dachau.
Sachsenhausen devait devenir un camp modèle que les autres camps devaient imiter. Les principaux commandants de camps de concentration y firent leur instruction, comme Rudolf Höss, qui dirigea Auschwitz.
Le camp fut bâti selon une forme triangulaire, avec une vaste porte d'entrée surmontée d'une tour située à la base du triangle. Sur la grille de fer, on peut lire la triste devise des camps : "Arbeit macht frei", le travail rend libre. Cette tour était le point central du camp où travaillaient le commandant et ses adjoints. Des miradors se trouvaient le long des murs qui délimitaient le triangle. Un autre triangle, extérieur, délimitait trois espaces distincts correspondant chacun à un côté de ce triangle : du côté de l'entrée, la Kommandantur, un garage et les maisons des SS; un secteur "VIP" constitué de petites maisons pour loger des prisonniers de guerre ou des otages (qui restaient donc à l'écart des autres déportés, comme Paul Reynaud, Georges Mandel ou Jean Borotra); une usine où les déportés travaillaient.
Près du camp, on a un vaste bâtiment qui était le centre de l'Inspection Générale des Camps (1937 : 1938) : Sachsenhausen était donc le centre du système concentrationnaire nazi.
La visite de ce camp est à la fois émouvante et passionnante, grâce à la découverte de plusieurs lieux muséographiques installés dans d'anciens baraquements. Ces baraques étaient disposées en éventail à l'intérieur du camp. A la droite de l'entrée principale, il y avait une série de baraques installées de façon linéaire, formant le secteur destiné aux Juifs.
Dans l'ancien secteur juif, une baraque abrite désormais un musée consacré aux persécutions antisémites perpétrées par les nazis.
Le camp avait aussi un bloc cellulaire, où les SS enfermaient les prisonniers qu'ils voulaient punir. Il avait la forme d'un T, mais il a été partiellement détruit.
L'intérieur du camp semble bien vide, mais il y a de nombreux éléments à voir : les miradors, les anciennes cuisines et la lingerie, le mémorial des déportés.
Le musée est remarquable, tant par la richesse des collections que par leur présentation. C'est à Sachsenhausen que fut mis au point, en 1938, le système des triangles qui permettaient aux gardiens de savoir immédiatement le "crime" commis par les déportés ainsi que leur nationalité grâce à une lettre (F = Frankreich): le triangle rouge désignait un communiste, le noir un asocial etc. Le triangle était cousu sur la veste au niveau de la poitrine et sur la jambe gauche du pantalon. Un bandeau de tissu blanc complétait les triangles, avec le numéro de matricule du déporté.
Le musée présente de nombreux objets utilisés ou fabriqués par les déportés.
Le camp a accueilli des déportés aux origines variables selon les époques, avec des "vagues" correspondant aux diverses étapes de la période : d'abord des opposants politiques anti-nazis, puis des Juifs jusqu'en septembre 1939, puis des résistants originaires de toute l'Europe dont des Français, des prisonniers de guerre soviétiques, des survivants de l'insurrection de Varsovie lors de la guerre, ainsi que des Roms et des Sintis, puis des déporté venus d'autres camps à partir de janvier 1945. En février 1945, il y avait 70 000 déportés dans le camp !
La visite se poursuit avec des lieux sinistres où des prisonniers de guerre soviétiques, au nombre de 13 000, furent mis à mort en août 1941, par fusillade dans une fosse, plus des Juifs tués par les gaz. Le camp disposait en effet d'une chambre à gaz, aujourd'hui détruite, mais on voit encore les fondations, ainsi que des fours crématoires formant la "Station Z", car elle était le point terminal du parcours des déportés dans le camp.
Environ 200 000 déportés furent internés à Sachsenhausen de 1936 à 1945; 84 000 y moururent : résistants de toute l'Europe, homosexuels, Roms et Sintis, prisonniers de guerre soviétiques (dont Iakov Djougatchvili, un des fils de Staline), Juifs ... Les conditions de vie y étaient très dures, ainsi que le travail, sans compter les exécutions.
De nombreux déportés durent travailler dans l'usine extérieur du camp ou dans des kommandos plus lointains, dans la menuiserie ou dans l'armement. Il y eu aussi des expériences médicales monstrueuses réalisées à l'intérieur du camp : stérilisation, castration, "traitement" contre l'hépatite, études raciales sur les Roms et les Sintis.
Le camp fut libéré le 22 et 23 avril 1945 par une unité de l'armée rouge et des soldats de la 1ère Armée Polonaise qui y trouvèrent plus de 3 000 déportés, dont de nombreuses femmes qui avaient été évacuées de Ravensbrück après une marche de la mort. Les autres, au nombre de 33 000, avaient été forcés de quitter le camp les 20 - 21 avril 1945 pour une marche de la mort en direction du nord de l'Allemagne et de la Baltique. Mais la sinistre existence du camp ne s'arrêta pas en 1945. Les Soviétiques le réutilisèrent (comme Buchenwald par exemple) pour interner les opposants politiques, anciens nazis bien sûr, mais aussi des anti-communistes. Jusque sa fermeture définitive en 1950, 12 000 personnes supplémentaires y moururent en raison des mauvaises conditions de détention. Ensuite, les autorités communistes détruisirent une partie des installations du camp dont le bloc cellulaire et la Station Z.
4 avril 2019
Les élèves ont pu rencontrer Karl Marx et Friedrich Engels ...
Et voir le palais impérial des Hohenzollern, reconstruit ...
Le but était d'abord de montrer le Nikolaiviertel, le quartier Saint-Nicolas, seul quartier ancien du coeur de Berlin, avec son église médiévale.
Puis ce fut l'Alexander Platz et la montée dans la Tour de la Télévision, une des grandes réalisations de la RDA. Haute de 368 mètres, cette tour fut une prouesse technique et la montée au sommet, par ascenseur, reste un grand moment.
Une vue incroyable sur Berlin !
5 avril 2019
Dernier jour à Berlin ! Il fallait encore profiter de la ville et donc ce fut :
- Le Musée d'Art Moderne :
- Une promenade dans le quartier de la chancellerie :
- Et surtout la visite de la coupole du Bundestag ! Un chef d'oeuvre de Norman Foster !
- Puis le Mémorial de l'Armée Rouge, qui perdit 100 000 hommes lors de la bataille de Berlin en avril - mai 1945.
Dans la soirée, nous entamions le retour au lycée ...
Les cinq jours passés à Berlin ont donc permis aux élèves de parcourir l'Histoire en traversant les siècles et la capitale allemande, par la diversité de son patrimoine, est un lieu adéquat pour réaliser ce parcours.
Jérôme Janczukiewicz, professeur d'histoire, organisateur du voyage.